Un prix négatif signifie l’inverse : ce sont les producteurs qui doivent payer pour que quelqu’un consomme leur électricité.
En temps normal, quand on achète de l’électricité, on paye le fournisseur.
Autrement dit :
Si vous consommez à ce moment-là, vous pourriez être rémunéré au lieu de payer.
Cela peut sembler contre-intuitif, mais c’est dû aux spécificités du marché électrique :
L’électricité est une énergie particulière – impossible de la stocker massivement comme le pétrole ou les céréales. Le réseau électrique exige un équilibre permanent entre production et consommation : un excès peut endommager les équipements, un déficit provoque des coupures.
Quand l’offre dépasse la demande, plusieurs facteurs se combinent :
- Production renouvelable élevée (grand vent + fort ensoleillement)
 - Consommation réduite (dimanche, jours fériés)
 - Centrales conventionnelles (nucléaire, thermique) difficilement modulables à court terme
 
Face à ce surplus dangereux pour la stabilité du réseau, la solution consiste à inciter davantage de consommation. Le mécanisme de marché fait alors chuter les prix… jusqu’à devenir négatifs ! Les producteurs « paient » ainsi les consommateurs pour absorber leur électricité excédentaire et préserver l’équilibre du système.
C’est pourquoi, paradoxalement, plus il y a d’électricité disponible, moins elle coûte – voire elle rapporte à celui qui la consomme.
Dans ces cas, pour ne pas surcharger le réseau, on préfère que les gens consomment plus. 
On baisse donc les prix… jusqu’à ce qu’ils deviennent négatifs !
Qui en profite ?
- Les gros consommateurs industriels (aciéries, usines…) : ils peuvent programmer certaines machines pour tourner au moment où l’électricité est gratuite ou négative → économie directe.
 - Les producteurs d’énergie, eux, perdent de l’argent dans ces périodes.
 
Le marché libre et contrats à prix fixe (souvent appelés PPA ou obligations d’achat)
Deux systèmes coexistent sur le marché électrique :
Le marché libre (marché spot)
- Prix qui fluctuent en temps réel selon l’offre et la demande
 - Peut devenir négatif lors de surproduction
 - Les producteurs et acheteurs s’exposent à la volatilité des prix
 - Système dominant pour les gros acteurs industriels
 
Les contrats à prix fixe (PPA/obligations d’achat)
- Prix garanti et stable sur plusieurs années
 - Le producteur reçoit toujours le même tarif (ex: 80 €/MWh)
 - Protection contre les fluctuations du marché
 - Sécurise les investissements, notamment pour les petits producteurs renouvelables
 
Le problème : quand le marché spot est négatif (-20 €/MWh) mais que les contrats fixes restent élevés (+80 €/MWh), cela crée un décalage de 100 €/MWh que quelqu’un doit financer – généralement les consommateurs via les taxes et contributions.
Exemple :
- Un petit producteur solaire a un contrat d’achat à 80 €/MWh avec EDF.
 - Le marché spot est à –20 €/MWh (prix négatif).
 
Le producteur reçoit toujours 80 €/MWh de la part d’EDF.
EDF revend ensuite cette électricité sur le marché à –20 €/MWh → perte de 100 €/MWh pour EDF.
Cette perte est compensée par la taxe CSPE payée par tous les consommateurs sur leur facture d’électricité.
Conséquences :
Pour le producteur à prix fixe : pas d’impact direct → il est sécurisé.
Pour EDF (ou l’acheteur obligé) : ils subissent les pertes en période de prix négatifs.
Pour la collectivité : ces pertes sont compensées par des mécanismes publics (CSPE en France), donc au final ce sont les consommateurs qui paient.
En résumé :
Un producteur sous contrat à prix fixe avec EDF n’est pas pénalisé par les prix négatifs. C’est EDF (et indirectement les consommateurs) qui absorbe le risque et la perte.
A long terme, le système de compensation (EDF + taxes) fait que la collectivité prend en charge ces pertes → donc la facture finale reste stable ou augmente légèrement.
Donc moins c’est cher, plus on paie !
Arguments pour « sortir du marché » :
Les dysfonctionnements actuels :
- Prix négatifs absurdes où on paie pour se débarrasser d’électricité
 - Volatilité extrême (de -500 €/MWh à +3000 €/MWh)
 - Coûts cachés reportés sur les consommateurs via taxes
 - Spéculation financière déconnectée des réalités physiques
 
L’alternative « gestion publique » :
- Planification à long terme des investissements
 - Prix stables et prévisibles
 - Optimisation technique plutôt que financière
 - Exemple souvent cité : EDF avant libéralisation (électricité parmi les moins chères d’Europe)
 
